Trois fois qu’on me marche sur la gueule !
Je me suis écroulé de mauvais poil mais là, je me réveille en rogne. Je risque un soulevé de paupière… c’est flou mais ça devrait s’arranger.
Ca y’est, encore un qui prend mon bide pour un trampoline ! Je couine ce qui laisse l’assistance indifférente.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que je ne suis pas seul. C’est à qui chantera le plus faux. Ca doit être un casting pour une téléconnerie.
Je rouvre un œil et ma prédiction se réalise. Je distingue les contours beaucoup plus nettement et les couleurs se précisent.
Ca sent le métissage sauvage. Il y a des blancs, des noirs, des rayés et même un tout rose sur le cou qui m’a tout l’air atteint d’une maladie téléthone.
Je baisse les yeux sur mon anatomie et constate que je suis jaunâtre et que j’ai cinq doigts ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Je suis assez fier de cette particularité ethnique et, si je n’y prends pas garde, je risque de finir gros con ce qui ne me fait que modérément plaisir. Je décide de lutter contre ma nature.
Un grand noir m’écrase la nuque en passant et je décide de me redresser. Je ne vais tout de même pas me laisser écrabouiller sans réagir. Ca s’agite dans tous les sens et je crois savoir pourquoi. J’ai faim et je suppose que je ne suis pas le seul.
Il fait une chaleur tropicale et si j’en avais la capacité, je crois que je suerais. A défaut je me fais suer.
Nous sommes une dizaine dans une boîte rouge rectangulaire avec des morceaux de coquilles éparpillés et quelques ovoïdes intacts qui commencent à sentir vilain. La turne est extrêmement mal tenue. Je nous vois mal partis dans un espace aussi réduit. Sans compter que si l’un de nous se mêle de grandir, soit il fait péter le couvercle soit il se fracasse le crâne.
Debout on m’évite plus facilement et je décide de faire comme les autres : déambuler dans tous les sens, sans but et sans intérêt, juste pour me prouver que j’existe.
Ca fait des heures que je marche, me pose, évite les autres et redémarre sans que ma vie, à peine commencée, ne paraisse avoir d’autre objet que de subir le temps qui s’écoule. Si c’est ça, c’est profondément chiant, la vie…
Soudain un bruit au dessus de nous. Le plafond s’écarte et une espèce de monstre bipède surgit. Je reste pétrifié devant le monstre titanesque tandis que mes codétenus sautent dans tous les sens au risque de se faire remarquer. Sa bouche se plisse en un rictus épouvantable et sa voix tonitruante lâche « Chouette, encore un ! ». Je n’ai pas idée de ce dont il peut bien parler.
Il brandit une main aux cinq doigts, tout comme moi ! Peut-être est-ce un clone raté ?
Son énorme paluche descend lentement, créant un crépuscule inquiétant au dessus de nos têtes.
Ses doigts se tendent vers… moi !!!!!!!!
…
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